Les déboires économiques de l’Asie du sud-est ou ... l’oubli de la loi de Newton
(“ce qui est monté ...  retombe !)

Conférence donnée au CERI par M.G.G. Pillai
(4 /12 / 97)

Asie 21, Futuribles,
Bernard Mély
 CNRS lab.  « Stratégie & technologie » / Ecole Centrale de Paris.
Ancien attaché scientifique à Pékin, ancien directeur régional « Asie » pour la francophonie universitaire à Hanoï.
Politique  de l’innovation et de la S&T. Docteur ès sciences physiques.


 
  Dans un contexte hypermédiatisé où les statistiques, déjà peu fiables, ne fournissent plus de repères l’auteur, apparemment observateur avisé de la vie économique de la région (1) , nous assène une de ses certitudes : le volcan des réajustements économiques n’a pas fini de gronder et pourrait secouer plus dramatiquement encore d’autres pays de la région, Japon excepté (car il disposerait de ressources propres ainsi que l’Inde, dans une certaine mesure et pour les mêmes raisons). 

Pourquoi ? 

 L’écran de fumées (rien à voir avec les récents désastres écologiques !) des dithyrambes sur les tigres, bébés tigres ou autres génies asiatiques de la croissance ont masqué la réalité d’accroissements de PIB perçus comme miraculeux à l’aune de notre économisme (“si les occidentaux disent que nous sommes bons c’est que nous le sommes“ !) et en particulier : 

- aucun des pays de la région ne peut se targuer d’une véritable industrialisation à part la Corée du sud qui a (trop) rapidement copié le modèle japonais : ce sont pratiquement tous des pays agricoles (2)   et Singapour ne serait qu’un “entrepôt“ particulièrement efficace (sic); 

- ces croissances mirobolantes de PIB ne provenaient pas d’accroissements de productivité mais de liquidités provenant de privatisations à outrance entamées dès l’accès à l’indépendance (exceptée la Thaïlande) et d’investissements improductifs (en Bourse, dans l’immobilier (3) ) apparentant les marchés financiers de la région à des casinos et reflétant cet appétit pour l’argent qui caractérise les mentalités de la région ! De plus, ces privatisations ont toutes eu lieu au profit de personnes (très) proches du pouvoir ce qui n’était pas un gage de saine gestion à long terme. 

- malgré l’existence d’instruments de planification (à 5 ans, à 25 ans, ..) les politiques économiques des états de la région s’apparentaient plus au “wishfull thinking“ qu’à une vision prospective élaborée : on n’y pensait pas au-delà du futur immédiat. 

 Au travers de métaphores décapantes sur des réalités asiatiques peu évoquées (4)  c’est, de la part de l’auteur, une invitation à un peu plus de bon sens pour appréhender cette région : la totalité des dirigeants de la région appartiennent à la première génération - post indépendance ou post “industrialisation“- à une ou deux exceptions près; ce sont les diasporas chinoises, agents économiques les plus efficaces de la région, qui sont les plus affectées par ces secousses; les changements les plus importants à attendre étant d’ordre culturels ils seront longs à intervenir (20-30 ans !?). Dans l’intervalle, une fois les experts du FMI (5)  repartis les anciennes habitudes reprendront vigueur avant que “la crise“ n’imprime de modifications durables au comportement de l’homo economicus asiaticus. 

On notera également au registre prospectif que : 

- la venue du FMI en Malaisie entraînerait le départ de Mahatir (dans un délai d’un an !); 
- les Philippines seraient les moins mal loties de la région grâce à une force de travail bien formée. 

Sommes-nous vraiment informés ...?      (B.Mély) 
 

1  journaliste à Kuala Lumpur, ancien correspondant de la Far Eastern Economic Review et correspondant de The Times, du Bangkok Post et du Canberra Times
2 avant la guerre le sud de la Corée était agricole et le nord industriel suivant une partition des plus classiques. 
3 ce dernier secteur servant dans certains cas à recycler l’argent douteux. 
4 ces pays doivent s’engager dans une croissance à base de transpiration et non plus d’inspiration (spéculative).
5 selon un ministre des finances de la région “aucun pays n’aurait survécu aux prescriptions du FMI“ ...!?
 

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